Vous saurez tout sur Paris Web 2016
Cette année encore nous nous sommes rendus au Beffroi de Montrouge pour assister à deux journées de conférences à Paris Web.Lors de cette édition, nous avons abordé des sujets très divers, voici les principales thématiques abordées.
Data, Big data, méga cata
Qui dit big data dit GAFA : comment ne pas aborder le sujet sans parler des ces multinationales du Web qui cumulent, exploitent et revendent nos données ?Car il convient d’être lucide sur la question, aujourd’hui, les GAFA nous connaissent mieux que nos propres parents, entre les données que nous publions, les données publiées par notre entourage et le recoupement de ces données. Le tracking permet également aux GAFA de cumuler de la donnée sur nous : quand on visite un site on envoie des requêtes qui sont identifiées et enregistrées.Autre acteur de la big data : data broakers, ces grandes entreprises (Acxiom en premier lieu) dont le modèle économique repose sur l’acquisition et la revente des données, ils ne sont ni plus ni moins que des courtiers en data.
A quoi servent ces data cumulées sur nous ?
- On peut les explorer, pour étudier les comportements.
- On peut les exploiter, comme dans le cas de l’application “Knockin” : une appli recensant par le croisement de data les adresses de personnes ayant liké la page de Nicolas Sarkozy ou retweeté une de ses publications, afin d’optimiser le porte à porte.
- On peut aussi les exploiter contre la gratuité d’un service, c’est le modèle des GAFA.
Comment nous, professionnels du Web, devons-nous agir ?
La règle numéro est de considérer que chaque donnée cumulée est une donnée sensible, quelle qu’elle soit. Une information être anodine pour les uns et sensible pour les autres, elle peut également devenir sensible si un changement de contexte intervient.Il est alors impératif d’offrir à l’utilisateur la possibilité de modifier et effacer les données qui le concernent.On peut aussi envisager une dératisation des sites sur lesquels nous travaillons : suppression des trackeurs, suppression de la fonction de partage sur les réseaux sociaux, éviction des services proposés par les GAFA (analytics, fonts, maps, CDN…)Enfin, on peut adopter la stratégie “privacy by design” :
- Par défaut, l’application respecte la vie privée, c’est l’user qui modifie la privatisation de telle ou telle donnée
- Usage du chiffrement (https)
- Internalisation des fonctionnalités : pas de disqus par exemple
- Penser a la valeur ajoutée des features
- Ne pas bloquer tor
- Structurer le stockage des données pour ne pas avoir les données sensibles liées a l’identité, au cas ou la base de données soit compromise
- Ne pas recueillir de données non nécessaires au fonctionnement du service
- Faire attention au stockage des mots de passe
- Ne pas recueillir de données sans en informer l’utilisateur
- Ne pas revendre les données
L’UX au coeur des réflexions
Cette année de nombreuses conférences UX étaient au programme, soulevant des questions qui nous ont particulièrement intéressées.
Les tests utilisateurs : pourquoi, comment ?
Les tests utilisateurs ont pour objectif d’évaluer l’utilisabilité d’une interface avec des vraies personnes. En général, ces tests sont réalisés dans des labos : on met les sujets en face du logiciel et on les observe, on prend des notes. Il est fortement recommandé de filmer les tests utilisateurs, car la vidéo est un outil de communication puissant qui génère de l’empathie entre l’équipe qui développe un outil et un utilisateur : l’utilisateur n’est plus une personna, mais une vraie personne. Les tests sur mobile soulèvent des questions supplémentaires :
- Quel téléphone possède mon utilisateur ?Un téléphone classique, un smartphone ou un touch phone ? La qualité d’utilisation du téléphone lui même a un impact sur le test. On recommande de tester avec les téléphones personnels des sujets, si toutefois on préfère leur prêter des téléphones, il est indispensable que les utilisateurs puissent s’approprier le téléphone et apprendre à s’en servir, sinon on risque de fausser le test.
- Dans quel contexte l’user utilise l’application ?En plus du test lab, il est recommandé de tester l’application dans le lieu d’usage, cela peut révéler des problèmes qu’on ne trouve pas dans le lab.
- De quelle connexion dispose l’utilisateur ?Globalement, les applications qui requièrent une connexion wifi pour effectuer une action ne sont pas forcément très pertinentes, dans la mesure où la 4G offre souvent une meilleure connexion que le wifi. Il faut malgré tout anticiper une connexion avec seulement du edge, et éviter de tester l’utilisabilité d’une app avec le wifi.
- Quel est le setup idéal pour mener un test utilisateur ?Il y a plusieurs équipements qui permettent de filmer les tests utilisateurs, mais ils sont souvent trop lourds, trop chers, ou mal adaptés. La meilleure solution reste le DIY : créer un système qui permette de filmer l’écran et les mains de l’utilisateur et s’adaptant à tous types de mobiles.
A vos tournevis !
Intégrer une dose d’ethique dans la démarche UX
Aujourd’hui, les sites Web sont soumis à de nombreuses lois, mais faut-il respecter ces lois à la lettre ou mettre l’utilisateur au centre de la réflexion ?Un exemple simple : les CGV sont obligatoire sur un site e-commerce, mais elles sont lues en moyenne 7 secondes par l’user, le temps pour lui de trouver la checkbox à cocher et le bouton d’acceptation.Les ateliers de co-conception peuvent permettre à faire remonter des conflits entre les différents acteurs d’un projet : les dev, les clients et l’UX designer.Le code de conduite de l’UXPA peut aussi apporter des éléments de réponse sur le sujet, avec les 7 objectifs listés ci-dessous :
- Agir dans le meilleur intérêt de tous
- Être honnête envers tous
- Ne pas nuire, et si possible contribuer aux bénéfices de tous
- Agir avec intégrité
- Éviter les conflits d’intérêt
- Respecter la vie privée, la confidentialité et l’anonymat
- Communiquer tous les résultats
L’UX du futur : screenless
Nous avions déjà appris lors des UX days que le futur des interfaces était dans les messengers, équipés d’IA. Aujourd’hui, la réflexion a été poussée plus loin dans le futur notamment du côté de l’ioT, avec la “screenless expérience” : des objets qui intéragiraient avec nous autrement que par l’intermédiaire d’écrans, par exemple :
- Par les gestes : une enceinte qui pourrait augmenter de volume en mimant un bouton de volume, et des musiques diffusées selon nos gouts
- Par du paramétrage : des lumières qui s’allumeraient en fonction de la luminosité extérieure, baisseraient en intensité après le diner lorsque l’on regarde la télévision
- Par la voix, comme cela existe déjà, malgré la réticence de nombreux utilisateurs à parler à des objets
- En fonction de notre position : un fauteuil qui diffuserait tel ou tel type de musique en fonction de l’inclinaison.
- L’humain augmenté avec des puces implantées sous la peau
Sans écran, l’expérience devient le produit. Le futur du design sera probablement sensoriel, mais cela pose la question du libre arbitre, de la détermination des actes ou des goûts de chacun par des algorithmes.Pour tout vous dire, on trouve ça glaçant !
Optimiser son tunnel de commande e-commerce
Nous avons vu quelques protips sur le tunnel de commande en e-commerce, des guidelines simples à appliquer, qui vous permettront d’optimiser vos taux de conversion :
- Si vous ne pouvez pas faire de https, écrivez “paiement sécurisé” sur la page, ça rassure
- Mettez en place un numéro de téléphone que l’user peut appeler dans le tunnel
- Ne mettez pas de champ “code promo”, déceptif pour l’user qui n’en a pas, et risque de quitter le tunnel pour aller en chercher un sur google, pour peut-être ne jamais revenir. Contentez vous d’une simple checkbox “j’ai un code promo” qui fait apparaître le champ
- N’obligez pas vos users à créer un compte utilisateur pour acheter
- Mettez un message leur indiquant que leur commande a bien été prise en compte
- AU lieu d’envoyer des e-mails à vos clients pour leur vendre d’autres produits, envoyez leur des e-mails les informant du statut de leur commande
- Prenez soin de vos users pendant la commande, mais aussi après
Et la créativité dans tout ça ?
Questionnements sur l’internet prêt-à-porter
L’excellente Amélie Boucher fait le constat qu’aujourd’hui beaucoup de sites se ressemblent en termes de design et d’expérience. Souvent le design passe comme un non sujet, avec le syndrome du « on ne va pas réinventer la roue ». Le plagiat ou l’utilisation de templates sont une solution de facilité, cela s’apparente plus à du benchmarking qu’à de la création. Alors comment proposer quelque chose de différent? Parfois on nous demande de créer quelque chose qui soit « comme » quelque chose de déjà existant, cela a pour effet de produire des clones, et donc de niveler la création par le bas : on ne pense plus, on se contente de produire des clones.Parfois il arrive de prendre des idées sans s’en rendre compte, on fait des choses à la tinder, à la airbnb, et on reste sur la route tracée, on ne prend pas de risques ni de chemins de traverse. On assiste à une standardisation des fiches produit par exemple. Ce que vous produisez doit dire qui vous êtes, en tant qu’individu. Plus qualitatif mais surtout plus vous. Le site de colette est un bon exemple, ils sont les seuls à pouvoir mettre de la musique sans être maudits. Il ne faut pas non plus être original pour faire original, il faut se poser de bonnes questions, se laisser aller à comprendre le domaine, s’imprégner véritablement. Le rôle du designer est d’être dans le détail et pas dans la facilité, il faut essayer de révéler ce qui sommeille.
Le site dayuse.fr est un bon exemple d’adaptation de la création au concept : les photos sont adaptées (de jour) et on cherche a faire dire a l’user pourquoi il veut une chambre pour quelques heures en journée et les visuels s’adaptent (repos, loisirs, business).
« engageant et moderne » ne veut rien dire car ce n’est pas ancré dans la réalité.
Quel process employer pour pousser la créativité sans regarder ce qu’il se passe ailleurs ?
- Il faut se mettre a la place de l’user, la carte d’empathie prépare a des solutions de design inattendues. Il faut partir de rien, d’une page blanche, ne pas se faire influencer par ce qui vient d’ailleurs.
- Il faut éviter le benchmark au début du projet car il conditionne.
- A éviter également : le brainstorming : on n’a jamais vu de grandes idées collectives naître, il faut réfléchir seul et échanger ensuite, sinon on sort des brainstormings avec des idées bateaux « faisons comme untel »
- Il faut sortir de sa zone de confort. Souvent les bonnes idées ne viennent pas devant l’ordinateur.
- Il faut être habité par l’envie de bien faire.
Retour d’expérience sur la refont graphique du bon coin
Le bon coin est probablement le site le plus connu de france, une refonte graphique a eu lieu en 2015, non sans difficulté. Tout d’abord il faut comprendre que la philosophie du bon coin est la suivante : l’UX d’abord, le graphisme ensuite. Historiquement, le jaune pâle en fond était présent parce qu’en 2006 les écrans faisaient mal aux yeux, et le fond blanc était très désagréable pour l’utilisateur, le jaune a été choisi pour une question de confort. La difficulté était de faire une refonte graphique qui ne perturbe pas l’user, ils y sont donc allé à tâton, en déployant quelques parties du site à quelques utilisateurs pour recueillir leurs remarques. Cette refonte a été très lente et très progressive, toujours en écoutant l’avis des principaux intéressés : les utilisateurs. Ainsi, ils ont posté des message sur twitter invitant les utilisateurs à se connecter à tel ou tel moment pour découvrir la nouvelle version du site et leur donner leur ressenti. Une démarche payante puisque le site a plutôt recueilli une progression de trafic, ce qui est très rare sur le court terme dans le cadre d’une refonte graphique.
Un peu de technique, juste un peu
Lancer son site international : facile ! A condition d’avoir pensé à tout
Il arrive régulièrement que l’on veuille faire évoluer son site pour le rendre à l’internationale. Seulement pour cela, encore eut-il fallu y penser dès le départ. Voici la liste de ce à quoi il faut penser si un jour, on compte passer son site à l’international :
- Langues
- Devises
- Taxes
- Frais de douane
- Dates (gestion des timezone)
- Gestion des erreurs sur les formulaires (nom/prénom, contrôle email et téléphone, ajout de champ comme par exemple l’État pour les USA)
- Sécurité : les captcha pas utilisable sur le territoire chinois par exemple
- Il faut tester des adresses de vrais users locaux
- Le design aussi doit changer comme par ex pour les langues qui se lisent de droite a gauche ou tout est inversé
- Choisir une typo qui fonctionne sur tous les alphabets
- SEO : google n’est pas le moteur de recherche numéro 1 partout dans le monde
- Partage sur les réseaux sociaux qui ne sont pas les mêmes dans tous les pays, et n’ont pas nécessairement le même fonctionnement
- Utiliser des CDN
- Les services externes ne sont pas forcément les mêmes, par ex google maps marche mal en corée du sud
Éco-conception : les sites Web au regime
L’éco-conception, c’est la rencontre entre développement durable et conception de site Web. Il y a aujourd’hui 70 fois plus d’internautes qu’il y a 20 ans, et les pages Web sont de plus en plus lourdes, donc de plus en plus polluantes : en 20 ans le poids des pages web a été multiplié par 115, et ces 5 dernières années, elles ont été multipliées par 3. Le Web a une empreinte environnementale très importante, c’est véritablement un 6eme continent. Les objectifs de l’éco conception sont les suivants :
- Réduire l’empreinte environnementale
- Réduire les coûts
- Améliorer l’expérience utilisateur
On analyse la promesse fondamentale du site Web, on eb fait le moins possible pour se concentrer sur les fonctionnalités essentielles, utilise à l’utilisateur. L’enjeu est avant les lignes de code et après les lignes de code, il a un impact sur l’allongement de la durée de vie des terminaux et la réduction du nombre de serveurs. Le gras numérique est avant tout du gras fonctionnel et graphique. Plus les sites sont épurés plus on réduit l’impact environnemental et plus l’accessibilité est possible. Attention a la surqualité les features pas nécessaires et les gadgets. Voici quelques bonnes pratiques clé :
- Éliminer les fonctionnalités non essentielles
- Quantifier le besoin : ai-je besoin de mettre 75 articles sur une page ?
- Approche mobile first pour être plus simple et plus léger
- Compresser les fichiers avant de passer en prod
Les progressive webapps
Souvent, sur mobile, la question est de choisir entre une webapp ou une app native. Une appli native coûte en moyenne deux fois plus chère qu’une webapp, et même une appli hybride (développée sur titanium ou react native) reste plus chère qu’une webapp. Sur une utilisation ponctuelle ou éphémère, l’user ne veut pas installer une appli, comme par exemple doodle, et 25 % des app sont supprimées par l’utilisateur à l’issue de la première utilisation. Alors comment profiter des avantages des app natives et des webapp à la fois ?En créant une progressive webapp. Ce n’est pas une app à proprement parler, mais une app survitaminée.Quelques attributs attributs permettent de définir une webapp :
- Linkable : il n’est pas nécessaire de télécharger quoi que ce soit pour l’utiliser
- Responsive
- Safe : en https, ce qui n’existe pas dans une app
- Fresh : toujours très à jour, sur tous les devices
- Interactive sur le même modèle qu’une app native, notamment avec des écrans de chargement pour faire patienter l’user
- Découvrable
- Installable
- Affichable hors ligne sur les pages déjà consultées
Pour le moment ce n’est pas à 100% équivalent, mais dans les quelques mois / années à venir, cela semble être la solution idéale pour pallier aux coûts des appli mobiles.
Pour conclure, nous avons passés 2 jours à apprendre, et échanger autour de nos métiers. Cette expérience qui nous permet une fois de plus de tourner notre métier vers l’avenir, d’interroger notre responsabilité de professionnels du Web sur des questions comme la vie privée, l’impact environnemental, la collecte des datas, et le bien être de l’utilisateur.Merci Paris Web, et à l’année prochaine.
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